L’Amour et le Crâne
L’Amour est assis sur le crâne
De l’Humanité,
Et sur ce trône le profane,
Au rire effronté,
L’Amour est assis sur le crâne
De l’Humanité,
Et sur ce trône le profane,
Au rire effronté,
Ma pauvre muse, hélas ! qu’as-tu donc ce matin ?
Tes yeux creux sont peuplés de visions nocturnes,
Ô fins d’automne, hivers, printemps trempés de boue,
Endormeuses saisons ! je vous aime et vous loue
Au milieu des flacons, des étoffes lamées
Et des meubles voluptueux,
Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Viens, mon beau chat, sur mon cœur amoureux ;
Retiens les griffes de ta patte,
Avec ses vêtements ondoyants et nacrés,
Même quand elle marche on croirait qu’elle danse,
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Imaginez Diane en galant équipage,
Parcourant les forêts ou battant les halliers,
Le Démon, dans ma chambre haute,
Ce matin est venu me voir,
Et, tâchant à me prendre en faute,
Au pays parfumé que le soleil caresse,
J’ai connu, sous un dais d’arbres tout empourprés
Dans des terrains cendreux, calcinés, sans verdure,
Comme je me plaignais un jour à la nature,
Il est de forts parfums pour qui toute matière
Est poreuse. On dirait qu’ils pénètrent le verre.
Fière, autant qu’un vivant, de sa noble stature,
Avec son gros bouquet, son mouchoir et ses gants,
Bizarre déité, brune comme les nuits,
Au parfum mélangé de musc et de havane,
Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
« D’où vous vient, disiez-vous, cette tristesse étrange,
Montant comme la mer sur le roc noir et nu ? »
Sous les ifs noirs qui les abritent,
Les hiboux se tiennent rangés,
Ainsi que des dieux étrangers,
Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre,
Et mon sein, où chacun s’est meurtri tour à tour,
Dans les plis sinueux des vieilles capitales,
Où tout, même l’horreur, tourne aux enchantements,